Choix de textes

Michel Aflak


L'Unité Arabe

 

La charte de la Ligue Arabe a instauré un type de coopération inepte entre les pays arabes. Ce type de coopération pourrait tout aussi bien s'appliquer à des pays que la langue, la race, l'histoire sépareraient et qui se trouveraient géographiquement éloignés les uns des autres. D'un point de vue général, cette charte entérine le morcellement actuel de la nation arabe, favorise les ambitions personnelles des dirigeants des différents pays membres de la Ligue. Dans son ensemble, elle témoigne d'une politique de soumission au fait accompli, qui facilite la capitulation des Etats membres devant les ambitions étrangères dans certaines parties de la nation. Ainsi, la Palestine a été jugée indigne d'accéder à l'indépendance "à cause de son immaturité politique"; d'autres pays arabes, dont les pays d'Afrique du Nord, ont été abandonnés à leur sort. Alexandrette a été annexée par la Turquie. D'autres Etats ont été encouragés à la passivité face à la menace sioniste.

(Ce que nous pensons de la charte de la Ligue Arabe. Publ. Périodique, n.° 1 -15 avril45).

 

Actuellement, l'union, l'unité, la République, la démocratie, la liberté, la souveraineté sont autant de thèmes qui alimentent les controverses entre Arabes; ou, pour nous exprimer avec plus de vigueur et de justesse, ces controverses ont pour auteurs des cliques de politiciens professionnels vendus corps et âme à l'étranger. Pour certains, la voie de l'unité, de la République et de la liberté n'est que le moyen de perpétuer les intérêts colonialistes: ici, des monarchies arabes prêtent leur appui à la République syrienne. Là, des gouvernements qui capitulent devant l'étranger continuent de brandir l'étendard de l'union et de l'unité. Il nous faut nous élever au-dessus de ces querelles qui n'ont aucun lien avec la réalité profonde de la cause nationale, quand bien même elles lui emprunteraient son nom, useraient d'une phraséologie prétendument patriotique et d'une terminologie pseudonationale.

"Notre devoir est de militer pour la sauvegarde de nos objectifs. "Al-Ba'th" (quotidien) - 29 Décembre 1949".

 

Après le désastre que nous avons essuyé en Palestine, plus personne ne peut encore se laisser leurrer par les apparences. Sept Etats arabes ont été vaincus par un ennemi qui ne disposait pas d'une armée organisée, mais seulement de bandes de terroristes. Il est clair que le nombre ne dispense pas de la qualité.

Après les expériences malheureuses et les dures épreuves subies par les Arabes, toute forme d'union vers laquelle nous tendrions nos efforts devrait garantir les éléments fondamentaux qui la rendent viable. On devra plus se préoccuper de la qualité que du nombre, de la forme ou de l'étendue géographique. En un mot, toute devra être fondée sur une union des forces populaires: condition primordiale pour augmenter la production nationale et parfaire notre potentiel de défense. Approfondir la conscience nationale peut, par ailleurs, promouvoir la production "spirituelle" et garantir notre défense spirituelle; ceci ira de pair avec la croissance matérielle et le perfectionnement de notre système militaire de défense.

"Nous voulons des objectifs positifs. "Al-Ba'th" - 4 Janvier 1950."

 

Chacun des objectifs du Ba'th, tels que nous les avons résumés dans "Liberté, Socialisme et Unité", sont fondamentalement d'une importance égale. Ils ne sauraient être isolés et l'exécution d'aucun d'entre eux ne devrait être différée. Mais un autre aspect de la question s'impose d'évidence: l'unité constitue en elle-même une priorité, et elle implique une supériorité morale que les membres du Ba'th ne sauraient négliger sous peine de se laisser entraîner par des courants idéologiques et politiques qui sont tout-à-fait éloignés de la renaissance arabe telle que nous la concevons.

"La nature révolutionnaire de l'unité arabe - Février 1953".

 

L'unité n'est pas un acte imposé par les circonstances et par l'évolution de la situation. Les circonstances n'y aident pas, et l'évolution pourrait bien se dérouler en sens contraire, engendrant une fausse cristallisation de la désunion. L'unité procède de l'efficacité et de la volonté de création et, pour y parvenir, il faut lutter à contre-courant et gagner une course contre la montre. En d'autres termes, l'unité inclut la notion de bouleversement et de combat. Les assauts de l'impérialisme et du sionisme se concentrent presque exclusivement contre l'unité arabe. L'impérialisme n'a pas besoin de recourir à l'action directe pour contrefaire la démocratie et le progressisme. En effet, aussi longtemps que sa position et sa logique conduiront chaque groupe pris individuellement à agir en vue d'obtenir des avantages illusoires aux dépens des autres, la fragmentation du monde arabe lui garantira un résultat identique.

"La nature révolutionnaire de l'unité arabe - Février 1953".

 

Alors que les "Unionistes" de la fragmentation considèrent que l'unité surgira automatiquement lorsque les circonstances se prêteront à l'unification politique, et estiment que l'unité ne demande aucune préparation particulière, si ce n'est sur le plan politique par des négociations et des manoeuvres diverses, la préparation idéologique se ramenant à des professions de foi venues des lèvres et non du coeur, d'un caractère si vague et si peu défini qu'elles permettent toutes les interprétations et toutes les incongruités; alors que l'unité vue par ces partis

régionalistes, dont nous connaissons bien les agissements, n'est qu'une notion superficielle, dépourvue de sérieux et reléguée aux derniers rangs de leurs préoccupations, l'unité telle que la conçoit le Ba'th arabe est une idée fondamentale et vivante. Elle dispose d'une théorie au même titre que la liberté et le socialisme. Comme eux, elle implique un combat quotidien sur les principes, organisé et continu, ainsi que des stades d'application sur la route menant à la victoire.

"La nature révolutionnaire de l'unité arabe - Février 1953".

 

L'unité arabe est un idéal et un modèle. Elle n'est pas l'aboutissement ou la conséquence de la lutte que mène le peuple arabe pour conquérir la liberté et accéder au socialisme, elle est l'idée nouvelle qui devrait accompagner et diriger cette lutte. La puissance de la nation arabe ne correspond pas à l'addition des potentialités de chacune de ses régions. La somme est supérieure sur le plan quantitatif, et différente par sa nature.

"La nature révolutionnaire de l'unité arabe - Février 1953".

 

Aussi devrons-nous conclure que le peuple arabe ne réalisera son unité dans le combat que dans la mesure où il mènera le combat pour l'unité.

"La nature révolutionnaire de l'unité arabe - Février 1953".

 

L'unité arabe est l'idée du bouleversement même. Elle est, dans ce sens, supérieure même à la lutte contre l'impérialisme, malgré le sérieux et la violence de cette dernière; supérieure aussi, à la lutte pour la libération sociale et pour le socialisme qui pulvérise les intérêts dominants ainsi que les règles et les coutumes les plus fermement établies. En effet la libération des forces étrangères bénéficie de l'enthousiasme direct du peuple, tandis que la libération sociale met en cause ses intérêts matériels immédiats. Ces deux libérations vont dans le sens général de notre époque qui avance vers la liquidation de l'impérialisme et de l'exploitation de classes, alors que l'idée d'unité n'implique aucune notion de passivité. L'intérêt matériel n'y apparaît que partiellement, indirectement, et avec des gains différés. Tout y est positif et c'est plus une notion spirituelle qu'une notion matérielle. L'unité relève d'un comportement prémédité et non pas d'une réaction spontanée. De même qu'elle implique de renoncer aux simplifications et aux intérêts immédiats, elle s'adresse à l'esprit et fait appel à une foi profonde, elle exige le sacrifice du présent au profit de l'avenir, une préparation rigoureuse et une éducation d'un type nouveau.

"Unité de combat et unité de destin - Août 1955".

 

La liberté, telle que la réclament un parti égyptien ou iraquien, et le socialisme auquel travaillent un parti syrien ou libanais, sont de nature différente de la liberté et du socialisme que réclame la nation arabe prise dans son ensemble et qu'elle est capable de réaliser en tant que nation dotée d'un héritage culturel, de capacités propres et de potentialités en vue d'une authentique renaissance. La liberté poursuivie isolément par chaque région arabe ne saurait atteindre en profondeur, en étendue et en signification le niveau de liberté auquel aspire la nation arabe lorsqu'elle s'interroge sur son destin et sur celui de l'humanité entière.

De même, le socialisme, réduit et gauchi à l'intérieur d'une seule région, au point de se limiter à des réformes partielles et trompeuses, ne saurait prendre son essor théorique et pratique que dans la mesure où il s'appliquerait à la totalité de la patrie arabe considérée comme une unité économique et comme une unité de lutte populaire.

"Unité de combat et unité de destin - Août 1955".

 

Dès lors que nous considérons la patrie arabe comme une unité, il devient clair que ses potentialités économiques sont complémentaires. Si nous voulons actualiser certaines de ces potentialités et progresser, il nous faut prendre en considération le lien qui unit les différentes parties de notre territoire. Ainsi éviterons-nous de construire vingt ports dans une seule région, en négligeant toutes les autres, et d'implanter une industrie dans un site où manquent les matières premières nécessaires, ce qui occasionnerait des frais excessifs, alors que nous pourrions si nous unifions l'économie de toutes les régions ou de certaines d'entre elles, créer une industrie pour nous, Arabes, sans avoir à faire appel aux capitaux et aux matières premières étrangères.

"La nature du gouvernement en Egypte - Mars 1956".

 

C'est au cours de la lutte qu'il faut procéder à l'unification. En effet, elle pénètre les âmes très profondément, opère une fusion entre elles, et suscite une mentalité commune: Lorsque chaque région agit indépendamment et organise indépendamment ses conditions d'existence, les difficultés surgissent et prennent une importance incroyable.

"L'unité de combat dans le Maghreb arabe - Mars 1956".

 

Le caractère révolutionnaire de l'idée d'unité arabe fait que cette unité ne peut se faire par le haut. Elle ne peut s'appuyer sur les procédés et principes qui servent de base à la Ligue arabe. Elle doit jaillir de la profondeur des masses arabes, se confondre avec les besoins les plus intimes du peuple et être au centre de son combat social et de sa lutte pour l'émancipation. De même, cela signifie que tout en demandant du temps et des efforts successifs pour se réaliser, l'unité ne sera atteinte qu'à la condition préalable qu'elle soit prise comme objectif et comme ligne directrice dès le départ. Toutes nos démarches doivent déboucher sur elle, se relier à elle et conduire à elle. Ce faisant, beaucoup d'intérêts régionaux et immédiats devront être sacrifiés, beaucoup d'obstacles élevés par les points de vue particuliers devront être surmontés. Car l'unité ne sera jamais le terme de notre lutte si elle n'en est pas le point de départ.

"La nature révolutionnaire de la cause arabe - Avril 1956".

 

Le plus grand danger qui menace l'unité vient de ceux qui, affectant de la servir, s'en faisant une gloire personnelle, s'accrochant à elle de toutes leurs forces, n'agissent ainsi que pour mieux nous illusionner, alors qu'ils sucent son sang, l'étouffent de leurs embrassements et, mettant dans sa bouche ce qu'elle ne veut pas dire, font d'elle leur prisonnière. Alors, ils la brandissent comme une menace et cherchent à l'échanger contre des privilèges et des postes de leader et autres bas intérêts matériels immédiats.

"Sur l'unité de l'Egypte et de la Syrie, sur- son orientation et les obstacles prévisibles - 7 Avril 1956".

 

C'est dans cette perspective que nous avons posé comme condition préalable à notre participation à un gouvernement de coalition nationale qu'il devrait se donner pour tâche la fusion entre l'Egypte et la Syrie. Nous savons que gouverner sur le seul plan national aboutit, entre autres, à différer ou à restreindre la lutte intérieure, perdre notre raison d'être et endormir le peuple, à moins que le plan national ne s'élargisse à l'unité. Retarder la bataille intérieure sans aucune contrepartie et sans justification revient à porter un coup à la politique de libération et revenir à une position de dépendance à l'égard de l'impérialisme.

"L'unité de la Syrie et de l'Egypte est le fruit du combat pour l'émancipation et constitue une garantie qu'il se poursuivra - 22Juin 1956."

 

L'unification de la défense se réduit-elle au commandement uni des deux armées et est-il suffisant d'unifier l'économie par l'échange des marchandises et une vague coordination entre les économies actuelles des deux régions, ou faut-il parvenir à une interaction entre les forces productrices des deux régions, réalisée à la lumière de nouveaux besoins et de nouvelles perspectives inspirés par l'unité et propres à orienter la production afin de répondre aux besoins des plus hauts objectifs nationaux?

Si nous posons de telles questions, c'est que le déviationnisme et la tromperie menacent l'unité dès ses premiers pas et parce que les obstacles sur son chemin ne sont ni rares, ni aisés à surmonter.

"Sur l'unité de l'Egypte et de la Syrie et sur les obstacles prévisibles - 7 Avril 1956".

 

Le peuple arabe, où qu'il soit, et quel qu'en soit le nombre, lutte en étant armé de la force de la Nation arabe tout entière, puisqu'il lutte pour la liberté de la Nation arabe tout entière.

"L'unité de l'Egypte et de la Syrie - 6 juillet 1956".

 

Nous commettrions une erreur grave si nous acceptions les avantages que nous vaut cette démarche sans en reconnaître en même temps la nécessité impérieuse. En effet, il ne s'agit pas seulement d'un pas en avant, mais aussi de l'unique garantie qui nous soit offerte de ne pas retourner en arrière et de ne pas perdre ce que nous avons déjà acquis.

Toute libération qui n'est pas garantie par l'unité reste précaire et susceptible de connaître la rechute. Tout progrès demeure superficiel, faussé et défiguré, si l'unité ne lui garantit pas le terrain nécessaire à son développement.

"L'unité de l'Egypte et de la Syrie - 6 Juillet 1956".

 

S'il est une question qui pourrait et devrait transcender les différends entre les partis et l'étroitesse de vue, c'est bien celle de l'unité. A quoi servent les réflexions et les actions des partis? Allons plus loin: à quoi sert leur existence même si notre grande patrie reste fragmentée et morcelée. Aucune région, aussi grande et aussi étendue soit-elle, ne pourra jamais se relever, et endosser avec profondeur et authenticité le fardeau des principes dont se réclament les partis, principes qui, d'ailleurs, ne pourraient jamais prétendre à la profondeur et à l'authenticité s'ils n'étaient inspirés par l'histoire de la Nation arabe au temps où elle était unifiée, et si l'image de l'unité à venir ne persistait dans les esprits et les coeurs de ceux qui défendent ces principes.

"L'unité de l'Egypte et de la Syrie - 6 Juillet 1956".

 

Rien ne garantit la permanence des acquis partiels et relatifs accomplis par les Arabes dans le domaine de la libération et du progrès s'ils n'embrassent la cause de l'unité arabe; grâce à l'unité ils seront en état de repousser les dangers externes qui les menacent.

"L'exultation de l'impérialisme. "Al-Ba'th" - 13 Juillet 1956".

 

L'une des caractéristiques de la renaissance arabe est qu'elle s'efforce d'émerger d'un état d'arriération économique sur des bases populaires, progressistes et révolutionnaires. Il faut que nous consacrions la plus grande partie de nos efforts à l'élévation du niveau de vie du plus grand nombre d'Arabes et que nous nous concentrions sur les points fondamentaux, tels le renforcement de la défense et l'établissement d'industries de base afin de libérer notre patrie de sa dépendance envers l'étranger. Tout cela devrait s'inscrire dans le cadre de la logique de l'unité arabe, qui réclame l'intégration de l'économie arabe afin qu'elle puisse fonctionner et demeurer ouverte à toutes les démarches tendant à l'unification tout en leur donnant plus d'ampleur.

"Bilan d'un stade de la lutte - Décembre 1956".

 

La patrie arabe constitue non seulement un tout économique, mais encore un tout politique et militaire. En d'autres termes, les différentes parties de ce territoire sont complémentaires. Les ressources en matières premières et en moyens de production dont dispose la Syrie ne représentent qu'une partie de ce tout économique. Lorsque l'économie de la Syrie est organisée dans la perspective que ce pays devrait posséder une industrie complète, composée de toutes les industries requises par un état indépendant, et si le Liban, l'Iraq et d'autres régions établissent leur planification dans le même esprit, on peut être sûr qu'au bout de fort peu d'années, chaque région sera irrémédiablement installée dans les conditions mêmes de la fragmentation et qu'il n'y aura plus aucune force au monde capable de les arracher à cet état afin de les ouvrir à l'unité arabe, à la coopération et à l'unification. Ainsi se gâchent la plupart des potentialités de la Nation arabe, en particulier dans le domaine économique. Nous pouvons appliquer cette constatation à tous les autres domaines, car les efforts exercés au bénéfice d'une région pourraient servir toutes les autres.

"Sur la situation en Egypte - 21 Janvier 1956".

 

Notre République Arabe Unie est le fruit de la révolution du peuple arabe et des luttes dans toutes les régions. Pour englober la totalité des régions arabes, il faudrait qu'elle devienne la source et la mère nourricière de la révolution dans toutes les régions qui composent la patrie. En effet, le principe qui fut à l'origine et servit de base à sa création et à son existence pendant tant d'années est lié à la notion d'unité arabe et à l'unicité de sa cause et de son combat. C'est le seul qui, de nos jours, soit à même de garantir sa survie et sa croissance, jusqu'à ce que son message soit traduit dans les faits, l'unité dans l'indépendance totale.

"Cette unité est une révolution arabe et une révolution à dimension universelle - 8 Février 1956".

 

Nous ne prétendons pas que l'unité arabe se fera d'un seul coup. Au contraire, il est raisonnable et dans la nature des choses de procéder par étapes successives. C'est là notre opinion, l'opinion que des stades successifs s'imposent et nous travaillons dans cet esprit et dans ce but. L'unité de deux ou trois régions représente un stade qui mérite que nous y consacrions tous nos efforts jusqu'à ce qu'ils aboutissent. Ce stade, à son tour, facilitera l'accession à un stade supérieur d'une unification plus étendue et plus importante.

"L'unité arabe et le socialisme - Février 1956".

 

Le jour où l'Iraq sera délivré des conditions anti-naturelles qui sont les siennes actuellement, rien ne sera plus précieux qu'une unité avec l'Iraq.

"L'unité arabe et le socialisme - Février 1956".

 

En liant l'unité arabe au socialisme, nous n'avons agi ni de façon téméraire, ni par improvisation. Nous avons découvert ainsi le seul moyen de faire de l'unité une réalité vivante et dynamique de notre vie, celle que chaque travailleur réclame quand il exige son pain, une augmentation de salaire et des médicaments pour lui et ses enfants, de même que le paysan le plus pauvre et le plus opprimé qui exige que lui soit restitué le droit de disposer des fruits de son travail et qu'il soit libéré de l'injustice et de l'esclavage. Nous avons fait de l'unité arabe une exigence vivante et réaliste qui fait partie de la vie du peuple arabe tout entier et de chacun de ses membres pris individuellement, une exigence mêlée aux faits quotidiens et aux plus humbles préoccupations de la vie, imbriquée intimement avec les besoins matériels.

"La rôle des travailleurs dans la réalisation de l'unité et du socialisme - Mars 1956".

 

Maintenant que la lutte arabe pour la libération a atteint un niveau comparable à celui qui fît son apparition en Egypte et en Algérie, et qu'elle s'accompagne et se confond avec une conscience sociale et progressiste chaque jour accrue, il n'est pas question que le problème de l'unité arabe et de ce qu'il faut entreprendre pour la réaliser puisse encore prêter à confusion ou être motif d'ambiguïté. L'unité est automatiquement devenue synonyme de libération, puisque l'impérialisme redoute avant tout l'unité arabe. L'unité est également devenue synonyme de progressisme à l'intérieur de la nation arabe, car les réactionnaires qui capitulent devant l'impérialisme et s'allient avec lui pour résister aux exigences sociales du peuple se doivent de soutenir l'impérialisme dans sa résistance contre le courant unitaire.

"Une seule route mène à l'unité - 21 Juin 1957".

 

L'unité est une révolution venue expulser ce qui est faussé et changer la situation actuelle, révéler les profondeurs et libérer les forces emprisonnées, mettre fin à un mode de pensée négative ainsi qu'aux caractéristiques régionales, qu'elles soient authentiques ou fausses et négatives, ce dernier cas ne résultant d'ailleurs que de l'absence d'unité. Tout ce qui a place dans notre vie actuelle ne mérite pas de survivre du seul fait de son existence. Quant aux éléments valables et positifs, ils viendront enrichir l'unité et s'harmoniser avec elle. En fait, ils représentent la condition nécessaire et préalable qui lui permettra de voir le jour.

"Questions et réponses - 1957".

 

L'unité ne peut plus être considérée comme un projet parmi d'autres projets ou comme un slogan parmi d'autres slogans. Elle est devenue une réalité vivante, mieux encore: l'accomplissement d'un destin, car il y a derrière elle une grande nation qui souffre d'une injustice profonde et qui est dans le malheur. Elle combat dans différentes régions, elle lutte sur de nombreux fronts, aussi bien intérieurs qu'extérieurs, afin de conquérir sa liberté et de pouvoir avancer dans l'accomplissement de sa mission. Derrière cette unité, nous découvrons aussi la logique de l'histoire, les tendances profondes de notre époque, la volonté d'être libres et aussi le progrès et la paix pour les peuples du monde, car ces peuples commencent à saisir le rôle positif réservé à la nation arabe le jour où elle sera libre, unifiée et prête à faire face à son destin.

"L'unité de l'Egypte et de la Syrie soutient le courant révolutionnaire et garantit sa poursuite - 6 Décembre 1957".

 

Il est faux, par conséquent, de considérer l'unité comme un processus consistant à additionner les éléments séparés, car il ne s'agit pas de l'unification de parties saines dont la désunion est récente et conjoncturelle. L'unité existe préalablement comme principe actif et créatif entre les diverses parties et, à l'intérieur de chacune d'entre elles, elle vit comme un élément nécessaire à cette partie elle-même, avant même d'être posée comme une forme de rapports entre les parties recherchant la coopération et la solidarité. L'unité ne prive pas une partie de sa personnalité. Tout au contraire, elle l'accentue et l'approfondit. Elle apporte la réalité, l'authenticité et la créativité à toutes les parties en les mettant à la place qui leur revient, place vivante faisant partie d'un ensemble vivant.

"Questions et réponses - 1957".

 

La nation arabe n'a cessé de rechercher son unité depuis qu'elle a été morcelée. Le Ba'th n'a pas créé le besoin ou l'objectif de l'unité, mais lui a offert une nouvelle conception qui le rende réalisable. Du point de vue du Ba'th, l'unité est une idée révolutionnaire et une action révolutionnaire, par opposition à la conception qui régnait dans le passé et dont nous subissons encore les conséquences. Cette conception consistait à vouloir coller ensemble les segments du monde arabe, alors que notre nouvelle conception révolutionnaire de l'unité implique une pensée créatrice et un combat qui, tous deux, s'attaquent aux conditions mêmes de la fragmentation et à tout l'héritage dû à cette fragmentation, qui s'exprime en mentalités, émotions, intérêts, conduites politiques et socio-économiques à l'intérieur de chaque région de la nation.

C'est ainsi que, dans l'acception révolutionnaire du terme, l'unité se trouve liée aux deux autres objectifs révolutionnaires: la liberté et le socialisme; elle se trouve en interaction avec eux, les alimente et est alimentée par eux. Pour la première fois depuis de nombreuses générations, cette unité fait partie du tissu même de la vie du peuple arabe et se mêle à l'intimité de son combat pour la liberté et l'indépendance. De même, l'unité est liée à toutes les revendications du peuple: pour les droits politiques et le pain quotidien, pour des conditions politiques et sociales propres à assurer la dignité humaine, et permettant à ce peuple de remplir sa mission nationale.

"Questions et réponses - 1957".

 

Si (Dieu veuille qu'il n'en soit rien! et ce ne le sera certainement pas) les efforts accomplis par la république se réduisaient au plan intérieur et si elle manquait à ses devoirs à l'égard de ses frères des autres régions, alors son existence même s'en trouverait menacée.

Nous croyons que le destin arabe est Un. Donc, notre république, en apportant son aide à l'Algérie et en oeuvrant pour la libération de chacune des régions arabes engagées dans le combat, se défend elle-même et renforce ses propres structures.

L'unité actuelle de l'Egypte et de la Syrie, après tant d'expériences et de longues luttes, repose sur le fait suivant: notre cause est une, son avenir même doit être voué à cette conviction et sa vie même dépend de la vie des autres régions arabes.

"L'unité de l'Egypte et de la Syrie - 20 Février 1958".

 

Il est important de réaliser que les débuts sont toujours difficiles et pleins de dangers. Nous devons être conscients du fait qu'il nous incombe de remplir un devoir sacré, de protéger cet événement historique et de le nourrir de toutes nos capacités. Nous ne devrions (jamais y trouver la justification d'un relâchement de nos efforts, nous retirer de l'action ou encore réclamer le salaire de nos efforts passés. Cette entreprise est encore soumise à de nombreux risques, parmi lesquels les risques explicites sont les moins graves, puisqu'on peut les voir à l'oeil nu, tandis que les risques cachés n'apparaissent guère, ou sont sous un faible éclairage. Parmi ces derniers, les plus graves sont ceux qui manifestent l'existence de séquelles de la mentalité de fragmentation, séquelles qui, si elles se mêlent à l'unité, elles lui ôteraient sa consistance et la conduiraient à l'échec.

"L'unité de l'Egypte et de la Syrie - 20 Février 1958".

 

Quand l'unité arabe deviendra l'axe de notre révolution, le coeur qui la nourrit et l'horizon qui l'inspire et lui donne sa ferveur, alors disparaîtront les raisonnements et les précautions qui, il y a quelques dix ou vingt années, imposaient à nos vies un niveau inférieur de pensée et d'action, et cette superficialité accompagnée de honte qui colorait la conduite de nos affaires et les conditions mêmes de notre existence. Que ce soit dans la bataille pour la libération et l'indépendance ou dans la bataille pour le progrès et la révolution sociale, l'idée d'unité a, dans toutes les régions arabes, ouvert largement la porte à des solutions radicales et décisives, parce que, de son fait, chaque région arabe devenait responsable des charges de la nation arabe tout entière et, en même temps, nourrissait de ses potentialités la nation arabe dans son ensemble. La nature révolutionnaire de cette unité se manifeste dans le fait qu'elle élève la lutte arabe à un plus haut niveau de souffrances et à de graves dangers, elle l'élève au niveau de la cause de la Palestine et de celle de l'Algérie.

"La Révolution de l'Algérie et la Révolution de l'unité - 4 Avril 1958".

 

A mes yeux, il s'agit d'un combat entre l'unité et le séparatisme, quoique, pendant une courte période, le combat ait été transformé en un combat entre le nationalisme et le communisme. Si nous avions donné son plein sens à l'unité, qui est pourtant d'une grande clarté, le combat ne se serait pas si aisément et si rapidement tourné vers de nouvelles complications, il ne serait pas devenu un combat entre nationalisme et communisme.

"Le combat pour l'unité de l'Iraq - Avril 1959".

 

Si des erreurs on été commises, l'unité est plus profonde que tout et elle peut corriger les erreurs. Cette insistance, cette accélération pour accomplir un pas de plus vers l'unité, ne fait que montrer à l'évidence le besoin ressenti par la nation d'emprunter un raccourci pour parvenir à l'unité, parce que c'est la route qui mène à la puissance.

"Caractéristiques du nationalisme progressiste -1960".

 

L'unité ne peut signifier rétrograder. Il s'agit de l'unité révolutionnaire de notre époque, une unité qui embrasse les masses et se confond avec le combat socialiste et, plus encore, avec l'expérience de la nation tout entière.

Cette profonde expérience humaine ne saurait être un processus mécanique, mais bien un processus menant à une nouvelle création de la nation. Ceci doit devenir bien clair.

"Caractéristiques du nationalisme progressiste -1960".

 

L'unité n'est pas une simple addition; ce ne peut être ni une juxtaposition d'éléments disparates, ni une opération strictement matérielle. L'unité doit procéder des nouvelles expériences arabes pour aboutir à une refonte totale des éléments constitutifs de la nation.

"Caractéristiques du nationalisme progressiste -1960".

 

Pour la cause nationale, le danger des erreurs qui ont amené l'échec de l'expérience de l'unité, disparaîtra dès que le peuple sera conscient de ces erreurs, saura comment les corriger et les éviter dans l'avenir. Quant au danger que présente la situation séparatiste, il ne suffit pas d'en connaître l'existence pour le faire disparaître: c'est une réalité qui a été mise à nu, mais il faudra que le peuple rassemble toutes ses énergies combattantes pour s'opposer aux privilèges réactionnaires et impérialistes qui constituent l'essence de cette nouvelle situation.

"Le désastre de la sécession - Février 1962".

 

Face aux responsabilités historiques résultant de cette première expérience d'unité, après des siècles de démembrement des pays arabes, il était impératif, pour que cette expérience fût une chose saine, encourageante et susceptible de porter ses fruits, pour la diriger et assumer jusqu'au bout cette immense responsabilité, que le choix fût porté, en raison de leur expérience, sur une élite de combattants venus du Maghreb et du Mashreq et que l'interaction fut poursuivie de manière approfondie et continue entre leur expérience propre et l'expérience révolutionnaire spécifique à chaque région. Il était également impératif que, dès le début, cette expérience fût consciente du danger séparatiste et des séquelles de la désunion, des problèmes posés par une société arriérée et des obstacles que les intérêts réactionnaires régionaux et impérialistes élève-raient sur sa route.

"Le désastre de la sécession - Février 1962".

 

Il faut distinguer deux aspects de la réalité qui se sont manifestés simultanément. Le premier, c'est que les erreurs commises dans l'application de l'unité, auxquelles s'ajoutait le faible niveau de conscience de la plupart des mouvements populaires dans la patrie arabe, rendaient pratiquement inévitable l'échec de cette première expérience. Le second aspect, c'est que la sécession n'a pas eu pour seule origine l'échec de l'expérience d'unité, mais, avant toute chose, que les intérêts réactionnaires, s'appuyant sur l'impérialisme dans cette région et dans l'ensemble de la patrie arabe, surent exploiter la mauvaise application de l'unité afin d'établir de nouvelles conditions en Syrie et dans la région, de sorte que la cause nationale perdit du terrain et que la situation des classes non privilégiées se trouve reportée de nombreuses années en arrière. Du même coup, ces conditions eurent pour effet de restaurer la puissance de l'impérialisme, à un moment où il était en voie de liquidation, de renforcer "Israël" et de lui assurer une large marge de sécurité pour l'avenir, d'asseoir plus solidement le pouvoir des rois, des princes, des grandes sociétés, de tous les exploiteurs et esclavagistes et de transformer l'unité arabe en une chimère, un fantasme tout juste bon à servir les intérêts impérialistes.

"Le désastre de la sécession - Février 1962".

 

Pour que le combat arabe unifié se trouve à l'abri des doutes et des faux pas, il faut impérativement s'assurer que le travail en vue de l'unité soit fondé sur une vision claire d'un système d'unité en mesure à la fois de conserver sa signification nationaliste et d'éviter une hégémonie régionale. Le système que le parti a adopté depuis les délibérations sur l'unité, et qui lui semble capable de répondre à son intention est celui d'un seul Etat fédéral.

Ce système tient compte à fois de ce que le peuple arabe est un, et de la réalité de l'existence de différentes régions arabes.

"Le désastre de la sécession - Février 1962".

 

Les erreurs commises par le gouvernement de la République Arabe Unie, aussi graves soient-elles, ne justifieraient pas la sécession. L'échec de l'expérience d'unité est le seul résultat d'erreurs accumulées, mais la sécession serait la conséquence de plans, de machinations et de conspirations.

"Le désastre de la sécession - Février 1962".

 

Pour préserver l'unité des manoeuvres des politiciens et de leurs marchandages, pour la mettre à l'abri des coups de ceux qui s'en détournent pour servir des intérêts de classe ou des points de vue régionaux, le parti lui a infusé sa force vitale et a rassemblé autour d'elle les forces populaires qui lui sont fidèles et qui sont capables de la transposer dans la réalité.

"Le désastre de la sécession - Février 1962".

 

Alors que la première expérience d'unité, la plus précieuse, a été réalisée puis a échoué, la sécession représente maintenant une forme nouvelle du morcellement qui a ses bases propres, sa propre logique et ses propres justifications. Nous assistons à l'unification des forces de l'impérialisme, du sionisme, des réactionnaires arabes et de tous ceux qui haïssent les Arabes (les Chou'oubiyyîne), non seulement pour interdire toute édification d'une nouvelle unité, mais encore pour pourchasser l'idée même d'unité et les forces qui la sous-tendent, pour les tailler en pièces où qu'elles se trouvent.

La sécession est un phénomène qui tend à perpétuer la désunion, à la montrer comme étant une situation authentique et éternelle, et que l'existence d'entités arabes séparées est le destin inévitable de la patrie arabe.

"La réaction et l'impérialisme constituent la plus grande conspiration contre notre nation - 20 Juillet 1962".

 

La sécession, telle qu'elle se présente aujourd'hui, exprime des intérêts réactionnaires et une mentalité anti-arabe (chou'oubiyya) ainsi qu'une logique régionale. Le devoir du mouvement progressiste est de retourner aux sources qui furent les siennes dès les débuts du nationalisme arabe. Nous nous référons à l'interaction qui doit exister entre la révolution nationaliste et la révolution socialiste, et à la nécessité de travailler pour elles de manière intégrée.

"Pour l'unité, il faut un combat révolutionnaire quotidien - Août 1962".

 

L'échec de la première tentative d'unification a provoqué une scission qui montre les embûches sans nombre dont est semé le chemin menant à l'unité vraie, sur le plan à la fois de l'action et de la pensée. Nous en voyons une preuve supplémentaire dans les rangs des nationalistes et des progressistes. Sous l'un de ses aspects, cette rechute est l'expression de la lassitude qui envahit parfois certains combattants nationalistes à l'instant où la tâche semble dépasser leur force, alors qu'il est si facile de goûter au succès en se contentant d'accepter la réalité régionale.

"Pour l'unité il faut un combat révolutionnaire quotidien - Août 1962".

 

L'évolution historique ne débouche pas fortuitement et gratuitement sur l'unité. L'unité implique une création et un enrichissement quotidien, des motivations, une éducation et une organisation. Aucun objectif nationaliste ne requiert plus intensément ces préalables. Son action, en effet, ne se développe pas sur le plan de l'immédiat, cet immédiat auquel est confronté le peuple arabe dans les régions de son monde morcelé. C'est une action qui va au delà des limites des problèmes régionaux du moment. Par conséquent, il est nécessaire de réaliser l'unité, de l'arracher au domaine de la théorie, de la pensée et de l'espoir, de la rapprocher, jour après jour, de sa réalisation. Le problème essentiel est de se méfier des dangers provoqués par des projets falsifiés et suspects. L'impérialisme et la réaction ont distrait les Arabes pendant des décennies. Ils sont encore capables de les distraire pendant de longues années à l'aide de projets falsifiés et suspects, confinant ainsi l'action arabe dans son ensemble à la persistance du morcellement, de la faiblesse et de l'exploitation.

"Pour l'unité il faut un combat révolutionnaire quotidien - Août 1962".

 

L'unité qui fut instaurée en 1958 entre la Syrie et l'Egypte n'était pas spontanée, elle ne provenait pas d'un coup de tête, elle avait été l'objet d'une réflexion préalable. On ne pouvait l'assimiler à un accident dû aux circonstances. Cette unité avait un passé, elle avait été précédée d'une planification, de réflexions, d'efforts et de combats. Le parti socialiste Ba'th en avait tracé l'ébauche deux ans avant qu'elle ne s'inscrive dans les faits et avait placé ses représentants au sein du gouvernement de coalition de Syrie, dès Juin 1956, à la condition que ce gouvernement adopterait le projet d'unité entre la Syrie et l'Egypte et travaillerait à sa réalisation. Dès cette époque, le parti Ba'th pensait et affirmait que, derrière son intention de réaliser ce premier pas vers l'unité de la patrie arabe, il fallait voir la volonté de rendre à tous les Arabes leur confiance dans l'idée et dans l'accomplissement de l'unité. En outre, il s'agissait de transformer ce premier état unitaire en une base et un support sur lesquels pourraient s'appuyer les combats arabes là où ils se déroulent et, plus particulièrement, la bataille d'Algérie et de Palestine. Le parti considérait que la situation de la Syrie et de l'Egypte constituait la meilleure base possible pour engager le processus d'unification.

Lorsque le secrétaire général du parti alla discuter avec le président Abd l Nasser de la grave question de l'unité, ce dernier annonça la nationalisation du Canal de Suez, ce qui déclencha la bataille que l'on sait. Dès cet instant, le parti, dans toutes ses branches arabes, se consacra à la défense de l'Egypte dans son nouveau combat contre l'impérialisme. En effet, cette prise de position n'était pas seulement dictée par la nécessité de l'unité dans le combat, elle préparait encore la voie de l'unité, car l'Egypte pouvait ainsi prendre conscience de la vérité et de la réalité de l'unité. Dans toutes les régions du Mashreq, le parti, en livrant la bataille du canal, offrit un préalable et un modèle pour l'unité. Par son mode d'action, le parti ne faisait que suivre l'idéologie arabe révolutionnaire. Il s'inspirait de sa doctrine, qui veut que l'unité soit révolutionnaire et ne surgisse pas spontanément, qu'elle implique au contraire un combat quotidien.

"Le désastre de la sécession - Février 1962".

 

Si la réalisation de l'unité arabe suscita l'enthousiasme et l'optimisme chez les Arabes conscients, elle ne provoqua pas une juste évaluation de l'importance de l'événement et de la nécessité d'être vigilants pour protéger cette unité des erreurs et des faux pas. La plupart des mouvements progressistes et révolutionnaires l'inscrivirent à leur crédit, l'exploitèrent et tirèrent d'elle la force qu'ils employèrent au bénéfice de leurs affaires régionales, sans jamais accepter d'endosser leur part de responsabilité qui impliquait qu'ils gardent l'oeil sur elle afin de s'assurer qu'elle ne quitte pas le bon chemin. Bien au contraire, leur adhésion fut aveuglée par d'étroites perspectives régionales et des intérêts transitoires. Ainsi encouragèrent-ils le déviationnisme, la facilité, et participèrent-ils à l'échec qui les concerna tous et, ce qui est plus grave, concerna la totalité du peuple arabe.

"Le désastre de la sécession - Février 1964".

 

Pour notre parti, l'orientation unitaire ne relève pas de simples intentions ou de prétentions, mais représente une authentique réalité. On peut considérer que notre parti est unitaire parce qu'il professe sa foi dans l'unité, qu'il a créé sa structure sur des bases unitaires et non pas parce qu'il se contente de diffuser des slogans unitaires. La tendance régionaliste, conçue comme une direction théorique, politique et organisationnelle, est de droite et déviationniste. C'est une tendance hostile au socialisme, à l'unité et à l'organisation révolutionnaire, ainsi qu'à toute action réellement populaire. Le devoir du parti est,de liquider cette tendance de manière définitive, car il s'agit d'une maladie qui doit être extirpée du corps du parti.

"Discours aux sections du Parti des campagnes syriennes - 18 Janvier 1966".

 

L'unité de la nation arabe est un fait à la fois positif et négatif. Positif, parce qu'elle représente la puissance et l'ordre juste des choses; négatif parce que la conspiration de nos ennemis englobe l'ensemble de la nation arabe, et parce que, lorsqu'ils frappent l'une de ses régions, c'est la nation tout entière qui est frappée.

"Les horizons lointains de l'action révolutionnaire - 14 Octobre 1968".

 

Un grand obstacle rendit vain l'effort accompli par la nation arabe, malgré les changements opérés au cours des vingt dernières années, qui se manifestèrent par l'apparition de systèmes plus progressistes que ceux qui existaient auparavant dans de nombreuses régions arabes, par des changements importants dans les rapports sociaux et dans les moyens de production. En effet, malgré toutes ces améliorations, l'effort arabe se montra incapable de tenir tête à ses ennemis de l'extérieur, de faire face à l'agression, au point d'aboutir à la défaite des Etats arabes.

L'obstacle fondamental à la réussite de nos efforts, camarades, c'est la réalité de notre morcellement. Les transformations qui se sont opérées et les progrès n'ont pu transcender le morcellement, en arracher les racines et en anéantir les causes. Et nous en sommes arrivés à une situation telle que la vie même de la nation arabe est menacée d'anéantissement. Le rythme de nos progrès n'étant pas égal à celui des ennemis qui nous convoitent, le temps ne jouera pas en notre faveur si nous ne trouvons pas la solution correcte pour rectifier la stratégie de notre action révolutionnaire telle que nous l'avons exercée au cours des vingt dernières années.

"La nouvelle étape est une étape de fondation - 23 Octobre 1969".

 

Les frontières de chaque pays arabe constituent les frontières de la nation arabe prise dans son ensemble, car ce qui définit une région définit la patrie arabe, l'existence arabe tout entière. Et rien ne saurait assurer la sécurité d'une région arabe si ce n'est sa participation à la grande cause arabe.

"La nouvelle étape est une étape de fondation - 23 Octobre 1969".

 

L'unité arabe ne s'accomplira qu'à la condition qu'elle devienne une unité de lutte, qu'à la condition que la grande majorité du peuple soit armée, la défende les armes à la main, et qu'elle devienne une unité de libération. Il faut que nous nous unissions pour libérer notre terre dont nous avons été dépouillés, car l'impérialisme et le sionisme ne nous laisseraient pas unis un seul jour.

"Le rôle de la classe des travailleurs dans l'édification de la cause arabe -Novembre 1969".

 

La bataille du destin à laquelle doit faire face la nation arabe réclame toutes les capacités et toutes les potentialités de la nation. C'est là une vérité devenue un axiome. Et, au stade actuel, il est dans la nature des choses de voir se développer et s'unir les capacités de la nation arabe pour les concentrer sur le travail d'unification des masses dans les régions qui entourent Israël, c'est-à-dire en Egypte, en Iraq et en Syrie.

"L'appel de la responsabilité historique - Mars 1971".

 

Si l'on accorde une importance primordiale à la région, c'est à dire à la partie prédominant sur le Tout, nous en arriverons à perdre la cause arabe. Un rassemblement des régions ne conduirait pas à l'unité, et une superposition des intérêts ne saurait correspondre à l'intérêt national.

"Les régimes et les masses sont les deux faces opposées de la nation arabe -15 Avril 1974".

 

Pour les Arabes d'aujourd'hui, la solution réside dans l'unité et la route qui y mène passe par la démocratie. Pour que l'unité ne reste pas au stade de la recherche théorique, et pour que la démocratie ne dévie pas vers des objectifs moins fondamentaux que l'unité, il importe que les masses concentrent leurs efforts pour arracher leurs droits dans une démocratie liée à l'unité. En d'autres termes, c'est en tant que masses qu'elles devraient réaliser l'unité, et c'est dans leur combat unifié qu'elles devraient réaliser la démocratie.

"Les régimes et les masses sont les deux faces opposées de la nation arabe - 15 Avril 1974".

 

Nous devons refuser l'Etat palestinien tel qu'il est prévu par l'accord. Nous devons refuser le retour des terres à Hussein. Ce qu'il convient de faire, c'est de dénoncer l'accord en Egypte et en Syrie et de pousser toutes les régions arabes à s'associer à cette dénonciation, car cet accord sert de caution au règlement sur l'Etat palestinien et au retour des terres à Hussein. Il faut recommencer la bataille et s'y préparer. Ou bien Israël acceptera la retraite inconditionnelle, sans contrepartie, et alors nous établirons une autorité nationale sur ce morceau de la terre de Palestine, en attendant sa complète libération, ou la lutte continuera dans l'avenir jusqu'à l'achèvement de la libération.

"Les régimes et les masses sont les deux faces opposées de la nation arabe - 15 Avril 1974".

 

Les conditions de l'avenir, ou un stade ultérieur, apporteront la preuve, avec réalisme et de manière plus tangible, que la cause palestinienne est, en fait, la cause de la nation arabe tout entière. En Syrie, en Jordanie, partout, notre défi à la conspiration impérialiste atteindra le point où il faudra recourir aux armes pour libérer la Palestine. Nous craignons que l'on cherche à désarmer les Palestiniens et la résistance palestinienne et nous devons nous tenir sur nos gardes. Mais, avec conscience et espoir dans l'avenir, nous devrons rendre la Palestine présente dans chaque région arabe et faire en sorte que les masses arabes prennent les armes au nom de la Palestine.

"La cause arabe révolutionnaire en Palestine. Discours du fondateur au comité politique de la révolution palestinienne en Iraq et aux dirigeants des unions populaires - 22 Avril 1974".

 

Notre compréhension de la réalité du morcellement et des entités régionales aidera à les dépasser dans l'avenir et à amorcer le processus de l'unification arabe. Ignorer leur réalité n'aiderait pas à l'unité.

"La capacité croissante des Arabes à confronter leurs ennemis. Discours du leader fondateur aux camarades syriens à Bagdad - 23 Juin 1974".

 

Camarades! Considérons l'unité arabe qui, à peine s'approche-t-elle de nous, semble s'évanouir comme un mirage. Il faut que nous la considérions d'un regard neuf pour éviter d'y mêler des idées erronées et pour ne pas tomber dans un désespoir injustifiable. L'unité arabe approche, et nous en sommes plus près qu'à aucun autre moment de notre passé, car elle fait partie de la conscience même des masses arabes. La conscience de l'unité s'est accrue de manière considérable, surtout au cours de la dernière guerre et depuis lors. Il existe diverses voies pour parvenir à l'unité. L'essentiel est que le haut niveau de maturité atteint par nos masses nous interdise de retomber dans nos vieilles habitudes émotionnelles, qui nous amèneraient à exiger des autres qu'ils s'unissent avec nous ou à sombrer dans la rage et le désespoir. L'unité, cela signifie que nous devons saisir chaque occasion, utiliser chaque domaine où la communication, la coopération, l'édification communes s'avèrent possibles entre les régions arabes. Considérons les gouvernements comme des manifestations temporaires et éphémères et construisons pour demain, pour la postérité. Il s'agit de frayer le chemin aux masses, même dans les régions où les gouvernements ont capitulé devant l'impérialisme. Les plans de l'ennemi nous veulent isolés, rétrécis, enfermés dans un cocon, cernés de toutes parts, afin de pouvoir pénétrer à l'intérieur de notre maison. Nous pouvons faire échouer ce plan de maintes façons, grâce à diverses initiatives. L'Iraq doit s'ouvrir à toutes les régions arabes, tout en gardant ses distances en ce qui concerne les questions de principe et en réservant son jugement en ce qui concerne la justesse de leur politique.

"L'expérience du Ba'th en Iraq est le point de départ de la révolution arabe - 24 Juin 1974".